Gazo et Tiakola : on a écouté leur album commun "La Mélo est Gangx", notre avis !

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Les fans de rap français ont pris leur mal en patience. Ils ont ainsi dû attendre ce 1er décembre pour enfin pouvoir découvrir ce qui est probablement l'événement le plus attendu de l'année 2023 : la sortie du premier véritable album de Gazo, après les cartons de ses mixtapes "Drill FR" (2021), disque de platine avec plus de 150.000 exemplaires écoulés, et "KMT" (2022), triple disque de platine avec plus de 355.000 copies vendues, qui l'ont propulsé parmi les plus grosses têtes d'affiche de la scène hip-hop tricolore. Sauf que ce premier effort n'a pas pris la forme escomptée. Plutôt que de miser sur un traditionnel disque en solo avec quelques invités, le rappeur a décidé de prendre tout le monde de court et de s'associer à temps plein avec Tiakola, véritable révélation de l'année dernière, qui est devenu le mélodiste le plus convoité de France après l'énorme réussite critique et commerciale de son premier album "Mélo" (2022), (triple disque de platine avec plus de 326.000 disques vendus), suite à son émancipation du groupe à succès 4Keus. Une annonce survenue seulement quelques jours avant la parution de ce projet intitulé "La Mélo est Gangx", mis en ligne sur toutes les plateformes de streaming ce vendredi.

Une complémentarité toujours évidente

Clairement, les deux hommes forment un duo d'exception. Mais rien de bien nouveau à ce sujet puisqu'ils ont déjà brillé à trois reprises ensemble à travers les morceaux "Kassav" et "Fleurs", sur les mixtapes du rappeur, mais aussi le titre "Mode AV" - sur lequel figurait également Niska - de l'album du jeune chanteur, sans compter les featuting de l'époque où Gazo s'appelait encore Bramsou. Une complémentarité évidente donc, qui se décline aujourd'hui le temps de douze pistes pour une petite quarantaine de minutes d'écoute sur "La Mélo est Gangx", intitulé judicieusement choisi qui fait à la fois référence aux incontournables gimmicks de Gazo (« La Mala est Gangx ») ainsi qu'au surnom de Tiakola ("Tiako La Mélo").



Et à l'écoute de "La Mélo est Gangx", leur association s'avère toujours aussi évidente. D'autant plus qu'ils se sont entourés de véritables références côtés producteurs, comme Flem (Freeze Corleone), Skread (Orelsan) ou bien Kore (Lacrim, SCH), pour ne citer qu'eux parmi leur myriade de collaborateurs. Un duo comparable à celui formé par les basketteurs Kobe Bryant et Shaquille O'Neal, comme évoqué dans l'introduction "24/34" qui fait référence aux numéros de maillot des deux sportifs - même si on peut noter que l'arrière n'a jamais porté le 24 mais uniquement le 8 lorsqu'il évoluait avec le pivot du côté des Los Angeles Lakers. Mais outre quelques références sportives et allusions convenues (la série "Top Boy", Tupac et The Notorious B.I.G., par exemple), l'intérêt de cet album réside avant tout dans les mélodies des tracks et dans les toplines entrainantes et savoureuses des deux artistes.

Un album sous forme de blockbuster mais...

Si bien que cette formule, assez exceptionnelle sur leurs premières collaborations, fonctionne bien aujourd'hui mais semble un peu diluée au fil du projet. S'il contient bel et bien quelques moments forts, il en résulte une sorte de compilation plus qu'un véritable album, qui tend davantage vers cette expression floue qu'est la "pop urbaine", plus que vers du rap en tant que tel. Dans ce contexte, Tiakola prend logiquement l'ascendant sur son comparse puisqu'il évolue ici dans un registre dans lequel il excelle, tandis que Gazo est lui trop souvent privé de son domaine de prédilection. Pourtant, comme une respiration pour étaler leurs talents respectifs, les deux hommes s'offrent au milieu du disque une piste solo chacun consécutivement : l'explosif "100K" pour Gazo et le redoutable "200K" pour Tiakola. Probablement l'un des enchainements les plus intéressants et réussis de ce projet avec deux des morceaux les plus aboutis.



Car pour le reste, l'ensemble de "La Mélo est Gangx", même s'il réserve quelques moments forts comme le tube assuré "Cartier", qui devrait affoler les compteurs, apparaît aux premières écoutes un peu fade et dépourvu d'âme ou d'ambition, souffrant de la comparaison avec leurs premiers featurings. À tel point qu'on peut légitimement se demander s'il s'agit là du meilleur album en commun paru aujourd'hui, puisque le belge Isha et le francilien Limsa d'Aulnay ont également choisi le 1er décembre pour dévoiler leur projet "Bitume Caviar (Vol.1)". Quoi qu'il en soit, il faut bien reconnaître que l'association entre Gazo et Tiakola, dans un premier temps artistique, semble être devenue stratégique au fil des mois avec deux des artistes les plus écoutés en France ces dernières années.

De plus, elle se révèle également symptomatique des maux qui caractérisent le rap depuis qu'il est devenu le genre le plus populaire en Hexagone, mais aussi dans le monde entier, s'engouffrant dans la facilité déconcertante de la culture de l'instantané plutôt que de nourrir l'ambition de monter en gamme et de marquer durablement son époque. Mais nul doute qu'au final, tout le monde (artistes, équipes, label, etc...) y trouvera son compte avec une belle couverture médiatique, des chiffres qui s'annoncent énormes et quelques tubes à la clé, comme "Cartier", "Afrikanbadman", "Notre Dame" - qui n'est pas sans rappeler le mastodonte "Die", le refrain accrocheur en moins - ou "Mami Wata".