Kendji GiracVariete Francaise » Variété française
samedi 12 novembre 2022 9:30
Kendji Girac en interview : "J'ai évolué mais je suis resté le même"
Par
Yohann RUELLE
| Journaliste
Branché en permanence sur ses playlists, il sait aussi bien parler du dernier album de Kim Petras que du set de techno underground berlinois qu'il a regardé hier soir sur TikTok. Sa collection de peluches et figurines témoigne de son amour pour les grandes icônes de la pop culture.
Devenu papa d'une fille, Kendji Girac aborde son nouvel album "L'école de la vie" avec un regard nouveau. En interview pour Purecharts, le chanteur populaire détaille sa nouvelle vie avec sa petite Eva, revient sur sa propre enfance, son évolution et sa collaboration avec Florent Pagny et Vianney sur ce disque marqué du sceau de l'amitié.
Crédits photo : Island Def Jam
Propos recueillis par Yohann Ruelle. Ton nouvel album "L'école de la vie" s'ouvre par "Eva", une magnifique déclaration à ta fille écrite par Juliette Armanet. Qu'as-tu ressenti en découvrant le texte pour la première fois ? Franchement ? Je me suis dit que c'était magnifique. J'ai tout de suite su que c'était une chanson que je pourrais chanter, avec des paroles qui me correspondaient. C'étaient les mots exacts que j'aurais pu dire à ma fille, et surtout ceux que je recherchais. Quand j'ai vu ce débordement d'amour, et cette mélodie, j'étais très très très content. Et surtout pressé de pouvoir la terminer et la sortir ! Juliette a vraiment su me cerner de A à Z, et elle a réussi, aussi, à choisir les mots qui allaient avec ma façon de chanter, parce que ce n'est pas toujours évident, surtout en français. Le français est très compliqué à faire sonner. C'est presque comme l'allemand je dirais, parce qu'il y a des R, des consommes très appuyées... C'est dur à chanter ! Trouver les mots justes et aussi bien écrits comme elle l'a fait, il faut être très fort. Je remercie vraiment Juliette d'avoir fait ça bien comme il faut, jusqu'au bout. (Sourire) Je ressens un vide immense quand je suis de ma fille Comment s'est passé le tournage du clip, avec ta fille ?On a passé une journée tout à fait simple, comme quand je suis avec elle et qu'on passe du temps ensemble. On avait installé des caméras de partout et je me suis juste amusé avec ma fille. Ce sont les images qui ont été capturées, parce qu'on ne peut pas faire "Action !" avec un petit bébé. (Rires) Je ne voulais pas lui infliger ça ! Donc c'était très naturel, avec des moments très doux mais très simples, quand je lui donne à manger, qu'on se fait des câlins ou qu'elle fait la sieste. (Sourire) C'était très beau, et très bien pour ne pas du tout fatiguer ma fille. Pour elle, c'était une journée totalement normale. On a oublié toutes les caméras qui étaient posées et cachées un peu partout. C'est facile de concilier ta vie professionnelle à cent à l'heure et ta vie de famille ? C'est quoi la clé pour trouver l'équilibre ? C'est d'être patient. Je l'appelle souvent au téléphone quand je suis parti, en FaceTime. J'essaie de retourner le plus rapidement possible à la maison dès que le travail est terminé. Je fais mon emploi du temps en fonction de ma fille, en fait. Je ne peux pas partir plus d'une semaine, par exemple ! Trois jours déjà c'est beaucoup trop, pour elle parce qu'elle me réclame, et pour moi parce qu'elle me manque. Je ressens un vide immense quand je suis loin d'elle. Je me dois de retourner auprès de ma famille pour les voir. J'ai l'impression que c'est un album où tu te livres beaucoup. Tu évoques par exemple ton enfance dans "Les jeunes" ou le single ''L'école de la vie". A quoi ressemblait Kendji quand il avait 10 ou 11 ans ? Ohlala, Kendji à quoi il ressemblait ? J'étais un enfant très inspiré, je trouvais tout le temps des jeux à faire avec mes cousins. On s'amusait à longueur de journées ! Avec un bout de bois on jouait à la guerre, on était souvent dans la nature. Dans les forêts, on construisait des cabanes en haut d'un arbre et on s'invitait à faire des pique-niques. (Rires) C'était énorme ! J'achetais des pointes, un marteau... J'essayais de trouver des palettes en bois pour pouvoir construire mes cabanes. Je me régalais. Je me disais que je ne pourrais jamais y arriver Tu rêvais déjà de devenir chanteur ?Je chantais déjà tous les jours. Avec ma guitare, avec ma voix, je chantais un peu partout, là où je me trouvais. Pour moi, c'était déjà bien de pouvoir chanter, c'était quelque chose d'incroyable. Mais je ne m'imaginais pas devenir un chanteur connu comme aujourd'hui. Je ne m'étais jamais posé la question, je me disais que je ne pourrais jamais y arriver. Ce n'est pas que j'avais pas confiance en moi mais je me disais qu'il fallait avoir un talent incroyable pour pouvoir faire carrière. Je n'avais pas le recul et la capacité de me dire que c'était possible. Même si la musique a toujours été super présente dans ma famille. C'est arrivé tout seul vers moi, on m'a appelé, on m'a demandé de participer à "The Voice", j'ai dit oui. Et voilà, après j'ai gagné l'émission, j'ai sorti des albums, j'ai fait des tournées et maintenant, ça ne s'arrête plus ! Je suis très fier parce que j'ai la chance d'avoir un public incroyable qui me porte beaucoup, qui me donne beaucoup d'amour et de présence. Je les remercie à ma façon en faisant de la musique et en leur donnant un bout de moi, par exemple avec la chanson sur ma fille. Dans le titre ''Les jeunes'', on sent que tu veux mettre des choses au clair. Tu parles de la jeunesse, des gitans... Qu'est-ce que tu veux exprimer à travers cette chanson ? Pour cette chanson, on s'est bien marré avec Vianney et Renaud [Rebillaud, ndlr]. On parlait de notre enfance et on s'est souvenu qu'on avait pas le droit à l'erreur avec les vieux, quand on était plus jeunes. Dès qu'on faisait une connerie, c'était toujours de notre faute ! On devait surveiller notre langage devant les adultes, et même dans nos chansons, on n'a pas le droit de faire des fautes de français, d'utiliser des expressions de jeunes... (Rires) On rigolait en parlant de ça et Vianney m'a dit : "Ben le voilà, le thème de ta chanson". Ce titre, c'est comme une petite remise en question mais d'un côté sympathique et bienveillant. Tu vois quand je chante "Vous les anciens m'avez violenté", je veux dire qu'on me montrait du doigt. Parce que mon grand-père était très sévère ! Il n'est plus là mais je l'aimais énormément. Même mon père est super strict. S'il voit un jeune faire le couillon, laisse tomber. (Rires) Donc voilà, c'est un peu le conflit des générations cette chanson. Vianney me connaît par coeur Justement, tu interprètes le titre "Le feu" avec Vianney, qui a également écrit plusieurs chansons dans l'album. Vous ne vous quittez plus depuis plusieurs années !Oui, ça remonte là ! Il m'a écrit beaucoup de chansons. Je crois que ça va faire sept ans qu'on se connaît. On s'est connu autour d'une guitare, on attendait dans les coulisses d'une émission. On s'écoutait jouer de loin alors je l'ai invité dans ma loge et on a commencé à prendre les guitares, pour jouer tous les deux. C'est à partir de là qu'a commencé notre amitié musicale et maintenant, on adore travailler ensemble. Il me connait par coeur, il sait trouver les mots pour moi. Et ça c'est très intelligent de sa part, c'est quelqu'un de très intelligent. Il est très fort ! Les chansons qu'on fabrique ensemble me vont comme un gant. C'est donc la guitare qui est le socle de votre complicité. Oui ! Sauf que lui, il est un petit peu plus blues comme ça [Il mime les positions des mains] et moi j'ai mon côté gipsy. Notre différence nous rapproche. C'est pour ça qu'on arrive à mélanger les deux, la pop et le gipsy, dans nos morceaux. Avec Vianney, c'est un tout. Je pense qu'on ne va pas s'arrêter là et qu'on va encore travailler longtemps ensemble. Faire un album commun à la manière de Vitaa et Slimane, ça vous botterait ? Pourquoi pas ! Ça nous brancherait. Mais là, on est vraiment focalisé sur nos carrières respectives, je pense qu'on pourrait l'envisager quand on aura 40 ans de carrière. (Rires) Un peu comme Johnny et les Vieilles Canailles ! On se retrouve avec un certain âge et on se fait des concerts tous ensemble, une fois qu'on a fait notre chemin. Le player Dailymotion est en train de se charger... Dans la famille, tout le monde adore Florent Pagny ! Tu as l'honneur de partager la chanson ''Encore'' en duo avec Florent Pagny, qui a pris du recul pour se concentrer sur sa santé. C'est un beau cadeau qu'il te fait...La chanson s'est faite il n'y a pas si longtemps. (Sourire) Ça faisait plusieurs années que je lui avais demandé de faire un duo mais par rapport à nos emplois du temps ou nos sorties d'albums, ce n'était jamais le moment adéquat. Pour avoir Florent Pagny, il faut attendre et être patient ! J'ai attendu 3 ou 4 ans. (Sourire) A chaque fois que je le voyais, je lui disais : "Florent, j'aimerais bien chanter avec toi, on n'a jamais chanté ensemble, ce serait un honneur pour moi". Dans ma famille, tout le monde l'adore que ce soit mon père, mon frère, ma mère, mes soeurs... On l'adore parce que c'est un chanteur à voix et chez nous, on adore les chansons à voix ! Quand j'en étais à peu près à la moitié de l'album, je me suis dit "Bon ben allez je me lance" et j'ai appelé Florent, parce que j'ai su qu'il allait mieux. Je lui ai dit : "Mon Florent, comment ça va, est-ce que tu t'es reposé ?". Il m'a dit "Oui ça va mieux" et je lui ai demandé : "Tu te souviens de la chanson que tu m'avais promise, est-ce que tu veux toujours la chanter avec moi ?". Et il m'a répondu "Mais oui, bien sûr". Alors j'ai tout de suite contacté Vianney pour lui dire "C'est bon on peut enclencher la sixième ! Florent Pagny m'a donné le feu vert, il faut qu'on travaille une chanson pour qu'on puisse chanter ensemble". (Rires) C'est Vianney qui l'a composée avec Renaud Rebillaud, je fais quelques guitares dessus. On a tous mis les mains dans le cambouis. Il est venu l'enregistrer avec toi ? Oui ! J'ai enregistré ma partie et j'ai invité Florent en studio. Ça faisait des mois qu'il n'avait pas chanté, c'est l'une des premières fois après tout ce qu'il s'est passé pour lui. Il était très content de chanter et il interprète magnifiquement bien la chanson. On a fait quelque chose de très vocal. Avec Florent Pagny, il faut en profiter ! Cette fois-ci, j'ai un peu plus osé des voix de tête. J'ai envie à l'avenir de m'orienter un peu plus vers la technique vocale et très haute que je peux avoir. Je vais le faire de plus en plus sur mes albums, là je commence à l'exploiter. Beaucoup de gens ne connaissent pas ce côté-là de ma voix. Il faut que je me fasse plaisir parce que j'aime bien chanter dans les hauteurs, je la sens mieux vibrer. J'ai quelques chevaux dans le moteur ! L'album renferme des duos avec Naps, Soolking, Soprano... Le fil rouge, c'est l'amitié ? Oui c'est l'amitié, le style de chacun qui donne la couleur de l'album. C'est un disque où il n'y a pas qu'un genre de musique qui sert de base, les styles se mélangent et je trouve ça bien. Il y en a pour tout le monde comme ça ! S'il y en a qui n'aiment pas la pop, ils écouteront un morceau gipsy. S'il y en a qui n'aiment pas le morceau gipsy, ils écoutent la ballade. S'il y en a qui veulent des chansons plus rapides, ils écouteront le titre urbain avec Naps. Il y a vraiment toutes les directions. C'est possible de tisser de vraies amitiés dans ce milieu compétitif ? Bien sûr ! Il faut juste sentir les bonnes personnes, sentir le feeling. Moi oui, j'ai noué de bonnes amitiés dans le milieu dans la musique où il y a des gens très sympathiques et bienveillants. Personne ne m'a encore fait de crasse. (Rires) Ça dépend des caractères. On arrive à sentir les personnes avec lesquelles on peut démarre une amitié, d'autres tu sens que non et tu ne vas pas chercher plus loin, ça reste un "Bonjour", "bonsoir" et voilà. Tu célèbres la culture gitane et latine avec ''Para Mi Dios'', qui ferme l'album... ¡eso es! Faire un album en espagnol, j'y ai pensé Tu te verrais, un jour, faire un album 100% espagnol ?Ce serait très bien. Peut-être qu'un jour je le ferais, oui ! Même deux albums en un, avec un côté français rempli de belles ballades et de chansons pop, et l'autre côté toute une partie en espagnol. J'y ai pensé à ça. D'autant que la musique latine connait une forte expansion dans le monde, avec des artistes comme Rosalia, Bad Bunny... Oui ! Le problème avec les chansons en espagnol, c'est les quotas. Tous les artistes latins passent en radio en France mais si un Français chante en espagnol, ça ne passe pas. Pourquoi moi je ne peux pas ? C'est dommage car sinon j'en ferais beaucoup plus. Mais comme il y a un quota à respecter, on ne fait pas trop. Je mélange un peu d'espagnol au français mais sans trop en mettre non plus. Par exemple, sur le duo avec Vianney, il y avait une plus grande partie en espagnol qu'on a enlevée. Elle était très belle, en plus ! Vraiment magnifique. Ça m'a fait mal au coeur de la sortir. Récemment, tu as fait tes débuts d'acteur dans le téléfilm "Champion". Poursuivre dans cette voie, ça te plairait ? Ça me plairait à fond ! J'en ai parlé y'a pas si longtemps. J'aimerais recommencer cette expérience de la comédie, recréer une histoire. J'attends juste un bon scénario pour pouvoir me relancer. J'aimerais jouer dans un film sur l'histoire de France Tu aimerais jouer quel type de rôle ?Je voudrais partir sur un projet complètement différent. Peut-être une comédie romantique ou un film d'action, un film sur la guerre de 39-45... Bon, sauf qu'il y a déjà beaucoup de films qui sont sortis sur ce sujet. (Rires) Pourquoi pas une épopée sur l'histoire de la France, avec des costumes et un décor à l'ancienne ? Ce serait sympa pour apprendre aux jeunes ! Je reçois pas mal de propositions mais ça ne me convient pas encore. Quand l'idée sera la bonne, je me relancerais. Il faut trouver le temps aussi, parce que là il y a l'album, il va y avoir la tournée... Si jamais je dois faire un film, il faudra le caler pour 2024. (Sourire) L'an prochain, on fêtera les 10 ans de ta victoire dans The Voice. Le Kendji d'hier est-il le même qu'aujourd'hui ? Dix ans ! C'est fou... Je pense que je ne me suis pas trop éloigné de qui j'étais. S'il y a une différence, c'est juste la maturité. J'ai évolué, c'est normal : quand je suis arrivé dans le milieu professionnel de la musique, je venais d'avoir 17 ans. J'étais tout jeune, j'étais un gamin de 60 kilos ! Mais je pense que dans le caractère et dans ma façon de vivre, je suis resté le même. En tout cas, j'ai gardé les mêmes envies : rester avec la famille, aller faire mes courses tout seul... Je recherche la normalité le plus possible. Maintenant que je sais gérer tout ça, je peux vraiment profiter de chaque moment de ma journée, dans mon travail et ma vie privée. Ralentir la cadence et faire une pause, tu y songes ? Pour l'instant, non. Là je suis à fond, j'ai plein d'idées et des trucs que j'ai créés, il faut que j'aille jusqu'au bout. Pour bien les faire, je ne peux pas me permettre une pause. II faut bosser ! J'ai encore des rêves, des objectifs. Si je m'arrête, je ne pourrais pas les accomplir. Alors on est là, on s'acharne et en plus on donne du bonheur aux gens, donc ce serait dommage de s'arrêter. Si on peut le faire, autant en profiter.
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