Crédits photo : Abaca
La RNT est à la radio ce que la Télévision Numérique Terrestre (TNT) est à la télévision. Média favori des Français avec plus de 42 millions d'auditeurs journaliers et 99% de foyers équipés, la radio ne s'est pas inscrite dans l'ère du numérique, contrairement à la télévision ou à la presse. Pourtant la fin de l'analogique et l'ère de la RNT avaient été annoncées dès 2007. Un rapport remis à François Fillon en mai 2011, par l'ancien directeur de France Culture, David Kessler, conseillait un moratoire «
de deux à trois ans ». Un frein oui, mais qui laissait la porte ouverte à des essais. La Bretagne avait été évoquée comme champ d'expérimentation supervisé par le CSA, Conseil Supérieur de l'Audiovisuel. Un observatoire a également été préconisé afin d'effectuer un travail de veille et de synthèse, pour au moins être à la page côté recherche, le jour où le passage au numérique serait imminent. Après des rumeurs d'abandon du projet, le CSA a annoncé que la RNT allait bel et bien voir le jour cette année.
La RNT en détail
Les avantages du numérique :
Une meilleure qualité de diffusion et de réception grâce à des systèmes de diffusion binaire et de correction d'erreurs. La qualité de réception sera beaucoup moins sensible aux perturbations et aux interférences.
Un plus grand choix de fréquences radios : il est possible de diffuser plusieurs radios sur la même fréquence en compressant le signal. C'est donc un système qui ouvre la voie à de nouvelles radios, étoffant l'offre.
La possibilité de véhiculer des informations associées comme par exemple le titre ou l'auteur d'un morceau, les paroles, la pochette etc. Des données complémentaires d'information seront aussi disponibles comme par exemple les coordonnées GPS d'un accident dans un flash routier.
Une fréquence unique partout en France pour chaque radio. Une étape importante, puisque seulement «
30% des Français reçoivent plus de dix radios au niveau de l'ensemble du territoire. La numérisation va permettre que sur l'ensemble de la France, il y ait autant de radios que dans une grande agglomération ou à Paris », expliquait Rachid Arhab, chargé du dossier au CSA.
Les inconvénients du numérique :
Les radios devront passer par un nouveau prestataire technique appelé "multiplexeur", chargé de coordonner la diffusion de neuf programmes sur une même fréquence. Le multiplexage signe donc la fin de lautodiffusion, totalement indépendante.
Le signal compressé handicaperait l'écoute de stations comme France Musique ou Radio Classique.
Écouter la radio numérique nécessite un matériel spécifique, encore rare. Tout comme pour la TNT, le passage au tout numérique suppose le renouvellement de l'équipement. Pour les français, il s'agira de se procurer un ou des appareil(s) d'un coût de 80 à 150 euros.
Les tuners (syntoniseurs) des chaînes hi-fi deviendront obsolètes.
Les radios privées opposées au projet
La principale source d'opposition vient en fait des grandes radios privées : Europe 1, RTL ou encore NRJ. Elles estiment que le coût des dépenses (3 millions d'euros par an) et les retombées publicitaires sont des données incertaines et ne constituent pas un modèle économique viable. Mais le projet est soutenu par les radios publiques et certaines indépendantes. Radio France conçoit que le dossier est «
complexe » puisqu'il est nécessaire, dans une période de transition, de financer deux systèmes : l'analogique et le numérique.
L'intervention du CSA relance la machine RNT
Le CSA a établi un plan en deux parties, dévoilé cette semaine. Premièrement, signer les conventions des stations qui avaient obtenu une fréquence en 2009. Cela concerne les villes de Paris (une cinquantaine de stations), Marseille (une quarantaine) et Nice (idem). Un premier pas dans le lancement à grande échelle de la RNT. La décision officielle sera prise fin mars. Deuxièmement, lancer un appel à candidatures pour étendre la RNT aux vingt principales agglomérations françaises. «
Nous visons un taux de couverture de la population légèrement supérieur à 50% », précise Rachid Arhab aux "Echos". «
Déjà titulaires d'une fréquence à Paris, Marseille et Nice, les radios nationales seront mises au pied du mur : si elles veulent prendre le train de la RNT et être diffusées en numérique partout en France, il leur faudra participer ».
Si le processus fonctionne comme prévu en France, un taux de couverture correspondant à 40% de la population sera nécessaire pour envisager dans un second temps une extinction totale de l'analogique. Aujourd'hui, seule la Corée du Sud a réussi un basculement de l'analogique au numérique. En Grande-Bretagne, dix ans après son lancement, la RNT n'a attiré qu'une dizaine de millions d'auditeurs. Aux États-Unis comme en Allemagne, la Radio Numérique Terrestre est toujours en cours de déploiement. La Norvège reste le seul pays européen a avoir avancé une date précise (janvier 2017) pour ce que les spécialistes appellent le "switch over".
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