vendredi 03 juillet 2009 0:00

Passi en interview

Bisso Na Bisso est de retour avec l'album "Africa" dix ans après le succès de l'album "Racines". Passi revient sur cette formidable aventure et nous parle de ce nouvel opus. Il évoque également les enjeux du continent africain et ses projets. Interview.
Bonjour Passi. Bisso Na Bisso revient dix ans après le premier opus. Pourquoi avez-vous mis autant d'années pour revenir ? (Nikolas Lenoir, journaliste) ?
Passi : Chacun d’entre nous a travaillé sur ses albums respectifs. Cela fait deux ans que nous nous sommes vraiment lancés dans un nouveau projet pour le collectif. Ces deux années ont ainsi été mises à profit de ce deuxième album studio. Bisso Na Bisso a toujours été une belle aventure et nous voulons continuer à la vivre.

Comment le groupe a vécu le succès du premier album "Racines", vendu à plus de 200.000 exemplaires ?
Nous l’avons très bien vécu car nous avions aussi bien la reconnaissance du public francophone que du public africain. Cela était notre objectif car nous avons dés le départ créé à partir de notre double-culture. Il y a une vraie vision. Nous souhaitions que notre travail véhicule des messages positifs et reflète musicalement nos influences culturelles.

En parlant de reconnaissance, Bisso Na Bisso a obtenu deux récompenses il y a dix ans lors des African Kora Music Awards (plus hautes distinctions musicales en Afrique) devant un public comportant entre autres Michael Jackson et Nelson Mandela. Quelle fut ta réaction ?
C'était un moment formidable.
Il y avait aussi plus de 350 millions de téléspectateurs qui suivaient la cérémonie en direct. Notre musique a touché beaucoup de monde. C’était un moment formidable. Nous avons grandi en Europe et le fait d’être reconnus en Afrique également avait pour nous une signification particulière. Cela nous montrait que nous étions sur la bonne voie, celle du partage et de la compréhension entre ces deux continents.

Quels sont les messages portés par cet opus ?
Nous essayons de souligner cette idée des États-Unis d’Afrique. Nous pensons que l’unité est une solution pour que les peuples africains aient un avenir meilleur. Les pays africains doivent véritablement s’unir. En ayant la participation d’artistes tels que Christophe Maé par exemple, nous voulons aussi montrer que toutes ces origines, ces influences peuvent plus que jamais travailler main dans la main pour faire de bonnes choses et préparer un avenir plus serein.

En parlant d’unité, la chanson "We are Africa" est-elle ainsi un hymne destiné à l’encourager ?
Tout à fait. Nous sommes sur cette chanson plus de vingt artistes issus de pays très différents du continent africain. Il y a tous les membres du Bisso Na Bisso mais aussi Ismael Lo, Jacob Desvarieux, Angélique Kidjo, Manu Dibango et encore beaucoup d’autres. C’est en quelque sorte notre "We are the world" et nous voulions faire ce titre depuis longtemps. Je suis ambassadeur de l’ONU et cela me tient très à cœur. "We are Africa" est également une association qui gère entre autres un orphelinat à Brazzaville. Les bénéfices de la chanson y seront d’ailleurs consacrés.

"Bisso Na Bisso" signifie "Entre nous". Cela reflète plus le travail collectif de Bisso Na Bisso ou la volonté d’unir les peuples ?
Bisso Na Bisso est un carrefour culturel.
Il s’agit des deux car nous mélangeons beaucoup d’influences musicales et nous travaillons aussi pour l’union des peuples. Bisso Na Bisso un carrefour culturel. Cela veut à la fois refléter l’idée de faire quelque chose ensemble mais aussi tous ensemble. Au niveau de l’album, cela montre bien que nous faisons un lien entre différents artistes, différents groupes, différentes musiques… Nous avons ainsi la volonté de mélanger le français avec le congolais par exemple et au niveau des arrangements, nous voulons également inventer des choses. "Africa" parle de ces liens positifs avec lesquels il faut avancer. Il n’y a aucune forme d’exclusion mais au contraire la mise en place de liens positifs avec l’extérieur. Il faut avancer les uns avec les autres et non pas les uns contre les autres.

Comment s’est fait le choix des invités présents sur l’album ?
C’est très varié en fait. Manu Dibango est un des pères de la musique africaine. Je le connais depuis un bon moment et nous l’avons notamment rencontré sur un festival. Un groupe comme Espoir 2000 fait partie de la nouvelle mouvance. Ils sont la jeunesse du coupé-décalé. Ils sont connus depuis un bon moment en Côte d’Ivoire notamment et nous sommes très heureux de l’avoir sur l’opus. Ces rencontres et ces participations permettent de donner des couleurs très variées à l’album.

L’album comprend également "Pas de différence", titre avec Christophe Maé. Le fait qu’il soit le chanteur francophone ayant le plus vendu en 2008 a t-il un peu déterminé ce choix ?
Cela montre bien que nous revendiquons notre double-culture. Il est vrai que nous n’avions pas invité d’artiste français populaire sur le premier album mais nous avons toujours montré notre attachement à la France. Nous vivons ici et nous avons une double-culture. J’ai croisé Christophe Maé plusieurs fois et sa musique est aussi très ensoleillée. Cela fait de plus un bon moment que nous voulions faire un titre ensemble. Il aurait certainement moins accroché à un morceau rap qu’à un titre pour Bisso Na Bisso. Nous avons trouvé un bon concept sur cette chanson "Pas de différence". Nous savons qu’il existe des différences mais au final, nous sommes tous des êtres humains donc nous n’avons pas de réelles différences. Nous n’avons vraiment pas besoin de nous créer des obstacles.

Sur un tel projet, le challenge est-il plutôt d’accorder plusieurs personnalités ou de donner une certaine cohérence musicale à l’album ?
Je suis aussi nourri de toutes ces cultures musicales.
Le challenge est surtout de réussir à se servir de cette double-culture. J’ai commencé à me faire connaître avec de la musique urbaine mais à la maison, nous écoutions aussi bien de la musique africaine qu’Édith Piaf et Georges Brassens. Le Congo était une colonie française donc dés ma naissance, j’écoutais du Johnny à la radio. Mes frères et sœurs écoutaient de la soul américaine. Je suis aussi nourri de toutes ces cultures musicales. Nous voulions que l’album reflète l’Afrique mais aussi ces influences. Cet album est un tiers de feu, un tiers de fun et un tiers d’expérimentation. Nous avions besoin de réactualiser le Bisso donc nous avons fait des choses qui ne se faisaient pas ailleurs. Il faut surprendre et ne pas se limiter à ce que les gens attendent de nous.

Le premier single de l’album "Show ce soir" est bien parti pour être l’un des tubes de l’été. Comment peux-tu le définir ?
C’est une carte de visite du projet mais il y a surtout un album derrière. Nous avons choisi "Show ce soir" comme premier single car il signifie que le Bisso Na Bisso se prépare et va de nouveau vers le public. C’est un morceau fun avec ce côté convivial que nous avons dans le collectif. Je pense que c’est une bonne introduction à l’album. Nous avons fait deux sessions d’enregistrement pour l’album. "Show ce soir" et "Électrochoc" font partie de la deuxième session qui a une couleur plus fun que la première. Il était important d’avoir cette couleur là également.

Retrouvez le clip de Bisso Na Bisso, "Show ce soir" :
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Le clip de "Show ce soir" a été tourné à Dakar. Quel est ton regard sur la façon dont des personnalités françaises de droite comme de gauche se sont exprimées à Dakar ?
Cela souligne qu’il y a un vrai malaise. Il y a des choses à dire sur le passé et des abcès à percer. Je pense que la communauté africaine le ressent ainsi. Je n’ai pas été fan du premier discours mais pas plus du deuxième. Il est bien de dire des choses mais il fallait les dire au bon moment. Il est dommage que Sarkozy ne reconnaisse pas dans ses discours l’importance du rôle tenu par l’Afrique dans le développement mondial. Il y a une forme d’hypocrisie et le fait de le reconnaître maintenant pour gagner des points en témoigne. Dans les discours des deux personnalités de gauche et de droite qui se sont exprimées à Dakar, je ne trouve pas de satisfaction. Je reproche à la politique de manquer d’amour, de "Je vous aime". Il y un vrai manque de considération et de reconnaissance. La France est un superbe pays et il ne faut pas qu’elle laisse ses enfants de côté.

Comme tu le disais, tu es ambassadeur de l’ONU. Considères-tu qu’avec les défis écologiques et économiques, le déséquilibre Nord/Sud est une des urgences de notre siècle ?
Il faut penser aux populations bien plus qu'aux intérêts financiers.
Je pense en effet qu’il y a énormément de choses à régler entre le Nord et le Sud. L’Europe a besoin de l’Afrique et inversement. Il faut bien plus penser à celles et ceux qui forment ces peuples africains qu’à ceux qui les dirigent. Il faut équilibrer les échanges pour qu’ils puissent avoir des vies plus justes. J’ai la double culture et je pense voir ce qui peut se faire de chaque côté car j’ai les deux visions. Certains pays comme le Cameroun ont développé une véritable autosuffisance alimentaire. Il reste beaucoup de problèmes mais les gens n’y meurent plus de faim. Dans d’autres pays, les choses sont bien plus difficiles. Il est choquant que des enfants meurent de faim dans des champs sous lesquels se trouve du pétrole. Il faut penser aux populations bien plus qu’aux intérêts financiers.

Parlons de tes projets solos. Bien avant le fait de collaborer avec Christophe Maé pour Bisso Na Bisso, tu as travaillé avec Calogero sur le duo "Face à la mer". Envisages-tu d’autres collaborations avec des artistes issus d’autres styles musicaux ?
J’aime beaucoup les collaborations. En travaillant avec Calogero par exemple, c’était la volonté de faire un titre ensemble et de montrer que nos deux styles musicaux pouvaient se retrouver dans une même chanson. J’envisage en effet de nouvelles collaborations. Certaines choses sont prévues mais ne sont pas encore concrétisées donc je préfère ne pas trop en parler.

Tu as participé au jury d’une édition de la Star Academy. En étant juré sur le même banc qu’Yvan Cassar, tu as là aussi représenté la musique urbaine là où elle n’était pas forcément. Quel regard portes-tu sur cette expérience ?
Je pense qu'il faut ouvrir certaines voies.
Je pense qu’il faut ouvrir certaines voies et cela peut être critiqué. Je me suis toujours attaché à ne pas trop écouter certains propos qui peuvent me limiter dans l’action. Le fait d’avoir été juré à la Star Academy a permis en effet à la musique urbaine d’être plus représentée à la télévision. Sur les chaînes américaines et je pense notamment à MTV, le rap, le hip hop sont très représentés et les choses sont plus difficiles en Europe. TF1 et Endemol ont ainsi fait part d’une certaine ouverture et ils ont d’ailleurs été corrects à mon égard. La musique urbaine, le rap ont parfois une image négative et il est important de montrer qu’il y a des jeunes qui créent. Les artistes de ces courants musicaux méritent au même titre que les autres le fait de pouvoir accéder aux médias et au public. La musique urbaine doit également être prise au sérieux et considérée par les programmateurs.

Outre Bisso Na Bisso, quels sont tes projets ?
Je produis des artistes avec mon label Issap Productions et je vais aussi commencer à travailler sur mon prochain album solo prévu pour le début de l’année prochaine. Nous allons d’ici là faire la tournée pour Bisso Na Bisso en France mais aussi en Afrique.

Quel message aimerais-tu transmettre au public et aux internautes ?
Ne laissez personne se faire un avis pour vous. Nous sommes très fiers de cet album. Venez l’écouter et faites votre propre opinion.

Merci Passi pour cette interview.
Merci à toi.
Pour en savoir plus et écouter les nouveaux morceaux de Bisso Na Bisso, visitez leur MySpace officiel.

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