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samedi 22 juin 2019 18:21

Two Door Cinema Club en interview : "Avec nos chansons, on veut faire réfléchir"

Par Théau BERTHELOT | Journaliste
Passionné par la musique autant que le cinéma, la littérature et le journalisme, il est incollable sur la scène rock indépendante et se prend de passion pour les dessous de l'industrie musicale et de l'organisation des concerts et festivals, où vous ne manquerez pas de le croiser.
Ce n'est pas un exercice ! Two Door Cinema Club publie cette semaine "False Alarm", un quatrième album qui prouve son envie de faire danser les gens. Depuis un hôtel parisien, le trio nord-irlandais s'est confié pour Pure Charts sur ce disque marqué par des thématiques modernes et engagées.
Crédits photo : Aleksandra Kingo
Propos recueillis par Théau Berthelot.

Il y a un gros changement avec "False Alarm" : vous quittez Parlophone et créez votre propre label Prolifica.
Kevin Baird : Oui, cela nous a définitivement donné plus de liberté. Sur ce label, il y a nos deux managers qui travaillent avec nous depuis le début. L'idée était que nous trois, avec nos deux managers, on puisse être notre propre label. On a aussi beaucoup travaillé avec Pias. Dans cette situation, c'était plus facile de faire accepter nos idées. D'avoir moins de gens dans notre équipe, c'est un vrai sentiment de liberté.

Musicalement l'album est dans la continuité de "Gameshow", vous semblez de plus en plus abandonner les guitares pour les synthés ?
Alex Trimble : Dans un sens, oui. Il y a encore beaucoup de guitares mais on a voulu changer la façon dont elles sonnaient. On a utilisé beaucoup d'effets, on a notamment branché les guitares sur les synthés pour voir le résultat que ça pouvait rendre. Il y a plus de synthés mais il y a plus de tout sur cet album, en général.

Qu'est-ce qui vous attire tant dans ce mélange pop, funk et électro ?
Alex : L'immédiateté de ce type de musique. C'est celle qui a toujours retenu notre attention, depuis notre plus jeune âge. Quand on fait de la musique on a toujours quelque chose à dire, quelque chose à raconter. Mais si on veut vraiment être écouté, il doit y avoir quelque chose d'efficace, d'accessible et d'immédiat. Cette musique nous apporte de la joie. On essaie toujours de mettre des éléments joyeux, dansants et libérateurs dans chacune de nos chansons. De naviguer entre la funk, la dance ou le disco nous permet de faire tout cela.

Regardez le clip de "Satellite" de Two Door Cinema Club :


On a toujours eu des idées folles, on a envoyé notre album dans l'espace !
"Gameshow" avait des inspirations très fin 70's (Chic, Prince, Bowie), là on pense plus aux 80's (Talking Heads, Bowie des années 80...) : est-ce exact ?
Alex : Absolument ! Les Talking Heads ont été une grande référence depuis nos débuts, mais c'est plus visible sur ce disque. Beaucoup de groupes de cette décennie nous ont inspirés sur "False Alarm" comme Devo ou Kraftwerk.

A quoi fait référence cette "fausse alerte" qui donne son titre à l'album ?
Sam Halliday : A beaucoup de choses, à vrai dire. L'idée principale est le fait que l'on soit constamment bombardé d'informations de la part de notre téléphone. Il est toujours en train de sonner ou de vibrer. On peut recevoir un SMS de notre mère qui nous dit "bonjour" ou un flash info qui nous informe d'un attentat quelque part dans le monde. Et tout cela nous provient d'un seul endroit, l'objet qui se trouve dans notre poche. Tout ça procure beaucoup d'angoisses, on ne sait pas si on va recevoir un e-mail stressant du boulot ou un message d'un ami nous invitant à aller boire un coup. A chaque fois, cela sonne un peu comme une fausse alerte.

Pour promouvoir l'album, vous l'avez tout simplement envoyé dans l'espace...
Alex : Parce qu'on pouvait le faire (rires). J'ai toujours été fasciné par l'espace et l'exploration spatiale. On a toujours eu des idées folles. Par exemple, depuis des années, je rêve d'aller dans l'espace ou de faire un concert tout là-haut. Cette fois-ci, grâce au label, on a pu trouver une équipe qui nous a dit "Vous pouvez aller dans l'espace, on peut même lâcher votre album dans l'espace". Bien évidemment, on a accepté tout de suite !

Regardez "Talk", le nouveau clip de Two Door Cinema Club :


On fait de la pop mais il y a plus que ça dans notre travail
Vous jouez sur un côté ultra-décalé dans vos clips "Talk" et "Satellite". Comment vous sont venues ces idées ?
Kevin : Tout est venu du réalisateur Max Siedentopf pour "Talk".

Alex : Les images sont inspirées des paroles, en réalité.

Kevin : Il a écouté très précisément le titre et les paroles pour pouvoir mettre en image le clip. On a une chance inouïe de toujours pouvoir travailler avec des réalisateurs ou des artistes très respectueux et très créatifs. On peut leur dire ce qu'on aime ou pas et ils travaillent en fonction de cela. C'est comme ça qu'on a rencontré Max. On lui a joué la chanson et il a eu cette idée folle de mettre en image les paroles. On s'est dit que ça n'allait jamais marcher : comment allions-nous faire pour tourner 90 scènes en une journée ? Mais grâce à lui et à l'équipe, le résultat est fantastique. Nous sommes très chanceux de pouvoir travailler avec de tels créateurs, et Max en fait partie.

Alex : Pour "Satellite", l'idée est venue du réalisateur Eoin Glaister. C'est quelqu'un que j'admire énormément. Nous lui avons envoyé notre morceau et quelques bribes d'idées mais on a lui laissé carte blanche sur les visuels. Le lendemain il nous a renvoyé un message en nous disant qu'il avait telle ou telle idée. Mais le jour d'après il nous a dit "Non, j'ai une autre idée, on a qu'à aller dans l'espace, c'est encore mieux". La danse, ça c'est notre idée (rires). On pensait que ce serait drôle. Mais tout le reste vient d'Eoin.

Ecoutez "Once" :


Il y a aussi un décalage entre les mélodies pop et des thématiques plus sombres, plus modernes. Dans "Once", "Nice to See You" ou "Satisfaction Guaranteed" vous abordez notamment la thématique des réseaux sociaux et de l'addiction aux likes.
Alex : Je parle surtout de notre époque. Ce qui est drôle c'est que tout va si vite et évolue rapidement et nous, nous restons les mêmes humains depuis 30.000 ans. On se bat pour comprendre et intégrer ces nouvelles technologies dans notre vie, ce qui est ironique au fond puisqu'il s'agit de nos propres créations. Nous avons créé des choses qui nous échappent aujourd'hui. J'écris sur ce que je vois autour de moi. Cette différence entre les paroles et la musique est importante pour nous. On ne fait pas qu'écrire de jolies chansons, il y a plus de sens dans ce que l'on fait. On fait de la pop music assez typique, certes, mais on veut que les gens comprennent qu'il y a plus que cela dans notre travail. Nous vivons une époque très intéressante, et c'est un sujet passionnant à explorer en tant qu'auteur. Je ne suis pas là à faire des commentaires ou des jugements sur ce qui nous entoure, je préfère donner mes idées et inviter ceux qui nous écoutent à me suivre dans mes pensées. Avec nos chansons, on pose des questions, comme si l'on débutait une conversation.

On est en train de détruire notre planète
L'autre grand thème est l'écologie, qu'on retrouve dans "Nice to See You", "Dirty Air" ou "Talk".
Alex : C'est devenu un thème essentiel et inévitable de notre monde. Encore une fois, on veut faire réfléchir avec ces chansons. Tout ça nous ramène au titre "False Alarm". Cela fait des années qu'on nous dit que c'est un problème très grave et qu'on doit s'en occuper. Mais aujourd'hui, il y a une sorte d'arrogance, d'ignorance ou de naïveté qui nous empêche de faire quelque chose de bien pour la Terre. On est en train de détruire la planète sur laquelle nous vivons : c'est important de s'en souvenir et d'agir pour que ça change.

Sur "Break", tu chantes "Is it too late to save me?" . Pourquoi cette question ?
Alex : Ce n'est pas si triste que ça (rires). Je pensais à ce que nous étions en train de devenir. Quand on devient une rockstar, on devient différent. La personne qui fait ces disques et qui monte sur scène... On devient une sorte de "double personne". Tu es toujours tiraillé entre la personne que tu as connue depuis que tu es enfant et celle que tu es maintenant. Ça peut être effrayant : tu peux perdre ce qui te définit comme le "vrai moi". Est-ce que le gars qui enregistre des disques est ton "vrai moi" ? Si je dois sauver une partie, laquelle choisir ? C'est très confus !

C'est la première fois que vous signez des textes aussi engagés. Pourquoi maintenant ?
Alex : Cela joue avec nos expériences, le fait d'explorer les choses... Quand j'étais plus jeune, j'avais toujours cette idée qu'en tant qu'artiste, il fallait avoir précisément un point de vue, des avis catégoriques... Il fallait solidifier tes perspectives et les montrer au public, pour leur montrer la voie. En grandissant je me suis rendu compte que c'était parfois le cas, et parfois non. Il a fallu que j'accepte que certaines fois, je ne savais pas exactement ce que je faisais. C'est comme ça que j'écris maintenant, pour ne plus être borné et avoir un point de vue définitif sur une idée. Je n'essaie pas de jouer un rôle de leader, je demande plutôt aux gens de nous accompagner dans ce processus.

On fête cette année les 10 ans de vos premiers morceaux. Quel regard portez-vous sur cette décennie ?
Kevin : C'est fou de se dire que ça fait 10 ans, j'ai l'impression qu'on a commencé il y a quelques années seulement ! Le fait de monter à Paris pour la première fois, de signer avec Kitsuné... C'est comme si c'était hier ! Il y a certains moments où ça a été plus facile mais, disons 80% du temps, c'était absolument génial et grandiose. C'est un peu comme un grand huit.

Sam : Ça a été une vie entière de voyages et d'aventures, le tout condensé en une décennie. Beaucoup trop de choses se sont passées. Une fois on était dans une salle aux Etats-Unis, on s'est dit "L'endroit est cool" et puis on a remarqué qu'une photo de nous était accrochée au mur. En fait, on était déjà venus mais on ne s'en souvenait pas !

Kevin : Ça a été une décennie surréelle. Ça été si génial et si étrange en même temps. Quand je regarde en arrière, j'ai parfois du mal à croire tout ce qu'il s'est passé depuis 2009.

Crédits photo : Aleksandra Kingo .
Toute l'actualité de Two Door Cinema Club sur son site officiel et Facebook.
Écoutez et/ou téléchargez la discographie sur Pure Charts.

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