Mathieu Boogaerts

Si on l'a souvent par commodité, comparé à Dominique A pour le côté minimaliste de ses chansons, Mathieu Boogaerts se révèle beaucoup plus proche de -M-, l'autre Matthieu, avec lequel il a d'ailleurs monté le groupe Tam Tam (Mat-Mat à l'envers) avant que chacun n'emprunte un parcours personnel. C'est également grâce à une Chedid (Emilie, fille de Louis et soeur de -M-), réalisatrice de son clip insolite, "Ondulé", où il se fait couper la barbe et les cheveux, qu'il a été repéré et a pu sortir son premier album "Super", en 1996. Voix légère, originalité, mine souriante pour raconter des histoires quotidiennes qui ne le sont pas toujours, le chanteur-voyageur multi-instrumentiste a très vite enchaîné festivals et tournées (dont un spectacle avec Dick Annegarn, l'une de ses rares influences avouées à part Bob Marley) avant de sortir un second opus en 1998 : "J'en ai marre d'être deux". Celui ne se vendant pas suffisamment, il se retrouve quelques temps sans maison de disque, jusqu'à ce que Tôt ou Tard (le label d'Annegarn, Thomas Fersen, Têtes Raides, Vincent Delerm, Jeanne Cherhal...) produise son troisième disque, "2000" en 2002. Dont, clin d'oeil malicieux, la dernière chanson s'intitule "Matthieu".

Mathieu Boogaerts a proposé en novembre dernier, une nouvelle galette "I Love You" (Top 69), tout en punch et en nerfs, qui vous saisit et vous croque avec la sensuelle férocité d’une bête sauvage, l’auteur d’"Ondulé" ne fait pas seulement voler en éclats cette image de chanteur lunaire qui, depuis trop longtemps, lui colle injustement à la peau. Tournant le dos à son passé, il s’offre surtout un aller sans retour vers un autre monde musical, un autre pays, dont il invente avec une volupté palpable la langue, les lois et les coutumes. Un pays qui, comme aux plus grandes heures du rock, du rap ou du funk, prônerait la révolution permanente.

N’en disons pas plus : s’épancher davantage sur les qualités de cet opus "I Love You", ce serait trahir le propos d’un disque qui, en trente-trois minutes menées tambour battant, célèbre les noces de l’esprit de concision et de l’esprit d’invention, et qui bénéficie actuellement - après "Siliguri", d'un nouvel extrait, "Come To Me".